Paroles de vétérinaires

« La santé mammaire au tarissement est absolument clé »​​​​​​​

Banniere lls en parlent

Santé mammaire au tarissement : un obturateur de trayons pour toutes les vaches

Les dernières recommandations internationales sur le traitement des vaches laitières au tarissement prévoient l’application systématique d’un obturateur interne1. Vétérinaire praticien à Saint-Flour dans le Cantal, Olivier Salat était précurseur de ces nouvelles pratiques, mises en place dans sa clientèle depuis plusieurs années avec des retours positifs.

« La santé mammaire au tarissement est absolument clé », rappelle Olivier Salat. En effet, la période du tarissement est la plus à risque de nouvelles infections intra-mammaires d’origine environnementale, qui se traduiront par des mammites en début de lactation.

La formation d’un bouchon de kératine est physiologique après le tarissement, fermant le canal du trayon et prévenant l’entrée des germes dans la mamelle. Toutefois, pour 30 % des trayons, ce bouchon n’est pas suffisamment hermétique2. Le premier objectif d’appliquer un obturateur au tarissement est de constituer une barrière physique protégeant contre ces germes durant toute la période sèche jusqu’au vêlage.

Associé à un antibiotique intra-mammaire, l’obturateur en optimise aussi l’efficacité car il prévient les pertes de produit survenant dans les jours qui suivent. De plus, utilisé seul chez les vaches aux mamelles saines, il contribue à la réduction des usages d’antibiotiques et aux risques de résidus dans le colostrum.

1. Consensus sur le traitement au tarissement présenté au congrès annuel National Mastitis Council 2018 à Tucson (USA).
2. BRADLEY & al., J Dairy Sci, 2015.
Olivier Salat

Retour d’expériences

Changement marquant des pratiques

Actuellement, l’obturateur représente 30 % des ventes de spécialités de tarissement dans la clientèle d’Olivier Salat, attestant l’évolution notable des pratiques.
Effectivement, pendant longtemps, l’utilisation d’un antibiotique hors lactation a représenté une solution incontournable pour traiter et prévenir les mammites. « Passer de l’utilisation systématique des antibiotiques à une utilisation systématique des obturateurs représente sans aucun doute un changement pour les éleveurs… mais également pour les vétérinaires ! », remarque Olivier Salat. « L’obturateur peut être perçu comme moins technique, mais l’intérêt de sa systématisation est scientifiquement prouvé, et a fait l’objet de nombreuses publications ».

Sur le terrain, le discours aux éleveurs valorise la sécurisation du tarissement : utilisé seul ou associé à un traitement antibiotique, une amélioration du taux de guérison mais également une baisse du taux de mammites lors des deux premiers mois de lactation sont observées.
 

Lever le frein du coût

Le facteur financier et le manque de temps sont les principales objections des éleveurs. Mais les contre-arguments sont simples car éviter les nouvelles infections est rapidement rentable :
« en plus des coûts directs du traitement des mammites cliniques s’ajoute le temps passé à traiter et le risque d’erreur aboutissant à un lait de tank positif aux antibiotiques. Les éleveurs ayant subi des épisodes de mammites colibacillaires sont "vaccinés" en quelque sorte, ils comprennent assez vite ». Olivier Salat explique également à ses clients que la plupart des échecs de guérison durant la période sèche ne sont qu’apparents : ils résultent généralement d’une réinfection –que l’obturateur évite– et non de la persistance d’une infection existante.

Cadrer le recours à l’obturateur seul

Le consensus international recommande de réserver l’utilisation de l’obturateur seul, sans antibiotique associé, aux vaches présumées non infectées dans les élevages à faible risque (taux de cellules dans le tank < 250 000 cellules/ml). La sélection de ces vaches est importante et il convient de choisir avec attention les éleveurs concernés et de les former : « des épisodes de mammites sont survenus dans des exploitations où l’hygiène de traite était mal maîtrisée ; des échecs ont également été déplorés suite au mauvais choix des vaches considérées comme saines -par des éleveurs mal conseillés- ce qui a contribué à déconsidérer injustement le produit », regrette Olivier Salat. « Nous spécifions bien à nos éleveurs que le choix d’administrer un obturateur seul ne dépend pas seulement d’un taux cellulaire. D’autres paramètres entrent en ligne compte, comme l’historique médical de la vache, son âge, sa production laitière, l’évolution de ses taux de cellules, le contexte des infections mammaires circulant dans le troupeau, etc. ». En pratique, cela concerne des éleveurs qui maîtrisent les taux cellulaires de tank, et utilisent l’obturateur seul sur les vaches à taux de cellules bas. Au global, dans plus des deux tiers des cas environ, un antibiotique reste associé.

Obturateur interne de trayon

Guillaume Lemaire et Jean-Philippe Nolorgues, vétérinaires, respectivement dans le Cantal et le Puy-de-Dôme, recommandent à leurs éleveurs d’utiliser un obturateur interne de trayon.
Tous deux visent d’en faire un outil d’accompagnement au tarissement sélectif.

Sur les 20 000 laitières que compte la clientèle de la clinique vétérinaire de la Haute-Auvergne à Saint-Flour (Cantal), « environ 30 % reçoivent un obturateur au tarissement », rapporte Guillaume Lemaire, l’un des praticiens de l’établissement.

De son côté, Jean-Philippe Nolorgues, vétérinaire à la clinique des Monts Dore, à Rochefort-Montagne (Puy-de-Dôme), évalue à 40 % la proportion des éleveurs laitiers de sa clientèle qui utilisent un obturateur au tarissement.
 

Guillaume Lemaire

Retour d’expériences

« C’est encore novateur »

Tous deux ont vu une augmentation constante de l’utilisation de ces produits depuis leur arrivée sur le marché il y a vingt ans. Ils ne sont toutefois pas encore adoptés par l’ensemble des éleveurs, alors que leur utilisation systématique est reconnue pour empêcher les germes de pénétrer dans la mamelle durant la phase de tarissement (lien vers l’article sur les obturateurs). « C’est encore novateur. Avant, c’était antibiotiques systématiques et parfois obturateurs ; désormais, les recommandations tendent vers le recours systématique aux obturateurs et parfois aux antibiotiques », résume Guillaume Lemaire. 
« Le frein à leur utilisation, c’est peut-être le coût », poursuit le praticien. Un coût qui reste toutefois bien inférieur à celui d’une mammite (lien vers l’article sur le coût d’une mammite).
« La résistance vient aussi du fait que ce n’est pas très connu », complète Jean-Philippe Nolorgues. « Certains éleveurs n’en voient pas encore l’intérêt. Mais il y a un signe qui ne trompe pas : tous ceux qui les ont essayés ne s’en passent plus. » Le profil de ces utilisateurs convaincus ? « Des gens plutôt techniques, et ceux qui livrent pour la transformation fromagère du lait cru, souvent très sensibilisés à l’hygiène et à la qualité. » 

Pratiques en transition

La transition vers un traitement sélectif du tarissement, où seules certaines vaches reçoivent une antibiothérapie, est d’autant plus difficile que la stratégie « tout antibiotique » fonctionne bien. « Il n’y a rien de pire qu’une nouvelle façon de faire qui déçoit », reconnaît Jean-Philippe Nolorgues. « Pas toujours facile de modifier les habitudes », renchérit Guillaume Lemaire. 
Les deux praticiens sont donc très prudents quant aux conseils qu’ils délivrent aux éleveurs, et préfèrent les amener progressivement à réfléchir à leurs pratiques. « On anticipe des mesures qui restreindraient l’usage des antibiotiques en élevage laitier, reconnaît Jean-Philippe Nolorgues, tous les maillons de la filière ont intérêt à ce que leur consommation baisse et les éleveurs sont en demande de conseil. »
En pratique, le choix des vaches au tarissement qui ne reçoivent que l’obturateur résulte de la prise en compte de plusieurs paramètres : « Le dernier comptage cellulaire, mais aussi tous ceux de la lactation, l’âge de l’animal, sa production, les germes qui circulent dans l’élevage, les cellules dans le tank... », énumère Guillaume Lemaire. « En cas de doute sur un animal, on préconise un antibiotique », assure Jean-Philippe Nolorgues.
Cependant, l’obturateur est aussi « un plus » avec l’antibiotique. « Il assure son maintien dans la mamelle. Chez certaines vaches fortes productrices, on observait parfois des pertes de lait dans les jours qui suivaient le tarissement. L’obturateur garantit que l’antibiotique reste en place préservant son efficacité. On obtient ainsi une double protection : on maximise la guérison des vaches malades et on empêche les nouvelles infections », poursuit Guillaume Lemaire.